CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION
DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD
DES FEMMES
La Convention sur 1’é1imination
de toutes les formes de discrimination à 1’égard
des femmes a été adoptée le 18
décembre 1979 par l’Assemblée générale
des Nations Unies. Elle est entrée en vigueur en tant
que trait international le 3 septembre 1981 après avoir
été ratifiée par 20 pays. Dix ans après
son adoption, en 1989, c'est presque une centaine de pays qui
se sont engagés à respecter ses clauses.
La Convention a marqué l'aboutissement de plus de 30
années de travail de la Commission de la condition de
la femme, organe fondé en 1946 par les Nations Unies
pour examiner la situation des femmes et promouvoir leurs droits.
Les travaux de la Commission ont contribué à mettre
en évidence tous les domaines dons lesquels les femmes
se voient dénier l'égalité avec les hommes.
Ces efforts en faveur de la cause des femmes ont trouvé
leur expression concrète dans plusieurs déclarations
et conventions, et notamment dans la Convention sur 1'é1imination
de toutes les formes de discrimination à 1'égard
des femmes qui est l'instrument juridique fondamental le plus
complet.
La Convention occupe une place importante parmi les traités
internationaux relatifs aux droits de la personne humaine car
elle rappelle les droits inaliénables des femmes, moitié
de la population mondiale. L'esprit de la Convention s'inspire
des principes fondamentaux des Nations Unies qui ont proclamé
à nouveau leur foi dans les droits fondamentaux de l'homme,
dans la dignité et la valeur de la personne humaine et
dans l'égalité de droits des hommes et des femmes.
En analysant en détail la signification de la notion
d'égalité et les moyens de l'atteindre, la Convention,
en plus d'être une déclaration internationale des
droits des femmes, énonce aussi un programme d'action
pour que les Etats parties garantissent l'exercice de ces droits.
Dans son préambule, la Convention reconnaît explicitement
que "la discrimination généralisée
contre les femmes existe toujours" et souligne qu'une telle
discrimination "viole les principes de l’égalité
des droits et du respect de la dignité humaine".
D'après l’article premier de la Convention, on
entend par discrimination "toute distinction, exclusion
ou restriction fondée sur le sexe dans les domaines politique,
économique, social, culturel et civil ou dans tout autre
domaine". La Convention réaffirme le principe de
l’égalité en demandant aux Etats parties
de prendre "toutes les mesures appropriées, y compris
des mesures législatives, pour assurer le plein épanouissement
et le progrès des femmes en vue de leur garantir l'exercice
et la jouissance des droits de l'homme et des libertés
fondamentales sur la base de l'égalité avec les
hommes" (art.3).
Le programme d'action pour l'égalité est énoncé
dans 14 articles. Dans son approche méthodologique, la
Convention a choisi de couvrir trois aspects de la situation
des femmes. La Convention expose en détail les droits
civiques et le statut juridique des femmes mais porte aussi
- et c'est cela qui la différencie en particulier des
autres traités sur les droits de l'homme - sur la procréation
ainsi que sur les incidences des facteurs culturels sur les
relations entre les hommes et les femmes.
Une place particulièrement importante est faite au statut
juridique des femmes. En effet, l'inquiétude quant a
l'exercice du droit fondamental qu'est la participation à
la vie politique est restée vive depuis l’adoption
de la Convention sur les droits politiques de la femme en 1952.
C'est pourquoi ses clauses ont été rappelées
dans l’article 7 de la Convention qui garantit aux femmes
le droit de voter, d'occuper des emplois publics etd'exercer
des fonctions publiques. A ce titre, les femmes ont, dans des
conditions d'égalité avec les hommes, la possibilité
de représenter leur pays à l’échelon
international (art. 8).
La Convention sur la nationalité
de la femme mariée adoptée en 1957, est reprise
dans l'article 9, aux termes duquel le mariage ne change pas
automatiquement la nationalité de la femme. Par là
même, la Convention attire l'attention sur le fait que
le statut de la femme sur le plan de la nationalité était
souvent lié au mariage et évoluait en fonction
de la nationalité de son mari et, de ce fait, les femmes
n'étaient pas reconnues comme des personnes à
part entière. Les articles 10, 11 et 13 affirment chacun
respectivement l'égalité des droits des femmes
en matière d'éducation, d'emploi et d'activité
économique et sociale.
La Convention insiste particulièrement
sur la situation des femmes rurales auxquelles il convient d'accorder
davantage d'attention au stade de la planification des politiques,
compte particulièrement tenu de leurs problèmes
particuliers et de leur rôle économique important
évoqués à l'article 14. L'article 15 affirme
la pleine égalité des femmes en matière
civile et commerciale et stipule que tout instrument visant
à limiter la capacité juridique des femmes "doit
être considéré comme nul".
Enfin, à
l'article 16, la Convention considère à nouveau
le problème du mariage et des rapports familiaux et affirme
que les femmes et les hommes ont le même droit de choisir
librement leur conjoint, les mêmes droits de décider
librement du nombre et de l'espacement des naissances, les mêmes
droits personnels et les mêmes droits en matière
de disposition des biens.
En plus d'exposer en détail les droits civils, la Convention
consacre aussi une grande attention à un souci vital
entre tous pour les femmes, à savoir leur droit de procréer.
Le préambule donne le ton en déclarant que "le
rôle de la femme dans la procréation ne doit pas
être une cause de discrimination". La relation entre
la discrimination et le rôle de la femme dans la procréation
est évoquée à plusieurs reprises avec inquiétude
dans la Convention. Ainsi, à l'article 5, il est recommandé
"de faire bien comprendre que la maternité est une
fonction sociale" et de faire reconnaître la responsabilité
commune de l’homme et de la femme dans le soin d'é1ever
leurs enfants.
En conséquence, la protection de la maternité
et les soins donnés aux enfants sont considérés
comme des droits essentiels et pris en compte dans tous les
domaines abordés par la Convention, qu'il s'agisse d'emploi,
de droit de la famille, de soins médicaux ou d'éducation.
La Convention exige même de la société qu'elle
offre des services sociaux, en particulier des services de garde
d'enfants, permettant aux femmes de combiner leurs responsabilités
familiales avec leur participation dans la vie publique. Il
est recommandé aux Etats d'adopter des mesures spéciales
qui visent à protéger la maternité; la
Convention spécifie en outre que ces mesures "ne
doivent pas être considérées comme discriminatoires"
(art. 4). Elle affirme également le droit des femmes
de décider librement du nombre des naissances. Il est
à remarquer que la Convention est le seul traité
relatif aux droits de l'homme à faire état de
la planification de la famille.Elle oblige d'ailleurs les Etats
parties à inclure des conseils relatifs à la planification
de la famille dans le processus éducatif (al. h de l'article
10) et à mettre au point des codes de la famille qui
garantissent les droits des femmes "de décider librement
et en toute connaissance de cause du nombre et de l'espacement
des naissances et d'avoir accès aux informations, à
l'éducation et aux moyens nécessaires pour leur
permettre d'exercer ces droits" (al. e de l’article
16).
Le troisième objectif général de la
Convention vise à élargir la conception que l'on
a des droits de l'homme, car elle reconnaît officiellement
que la culture et la traditionpeuvent contribuer à restreindre
l'exercice, par les femmes, de leurs droits fondamentaux.
Ces
influences se manifestant sous forme de stéréotypes,
d'habitudes et de normes qui donnent naissance à la multitude
des contraintes juridiques, politiques et économiques
qui freinent le progrès des femmes. Remarquant la corrélation
entre ces influences, le préambule de la Convention souligne
"que le rôle traditionnel de l'homme dans la famille
et dans la société doit évoluer autant
que celui de la femme si on veut parvenir à une réelle
égalité de l'homme et de la femme".
Les Etats
parties sont donc tenus de modifier peu à peu les schémas
et modèles de comportement socioculturel en vue de parvenir
à l'élimination "des préjugés
et des pratiques coutumières, ou de tout autre type,
qui sont fondés sur l’idée de l'infériorité
ou de la supériorité de l'un ou l'autre sexe ou
d'un rôle stéréotypé des hommes et
des femmes" (art. 5). Il est demandé à l'alinéa
c de l'article 10 de réviser les livres, les programmes
scolaires et les méthodes pédagogiques en vue
d'éliminer toute conception stéréotypée
des rôles de l'homme et de la femme dans le domaine de
l'enseignement.
D'une manière générale,
les schémas culturels qui définissent le domaine
public comme celui de l'homme et le foyer comme celui de la
femme sont énergiquement remis en cause dans toutes les
clauses de la Convention, qui affirment l'égalité
des responsabilités des deux parents dans la vie de la
famille et l'égalité de leurs droits en ce qui
concerne l’éducation et l’emploi. Prise dans
son ensemble, la Convention fournit ainsi un cadre de travail
très complet pour lutter contre les diverses forces qui
ont crée et maintenu les discriminations fondées
sur le sexe.
La mise en oeuvre de la Convention est contrôlée
par le Comité pour l’é1imination de la discrimination
à l’égard des femmes. Le mandat du Comité
et la manière de suivre l’application de la Convention
sont définis dans les articles 17 à 30 de la Convention.
Le Comité se compose de 23 experts proposés par
leur gouvernement et élus par les Etats parties sur des
critères "d'une haute autorité morale et
éminemment compétents dans le domaine auquel s'applique
la Convention".
Tous les quatre ans au moins, les Etats parties doivent présenter
au Comité un rapport sur les mesures qu'ils ont adoptées
pour donner effet aux dispositions de la Convention. Au cours
de la session annuelle du Comité, les membres du Comité
analysent les rapports nationaux avec les représentants
de chacun des gouvernements et étudient avec eux les
domaines dans lesquels le pays concerné devrait prendre
de nouvelles mesures. Le Comité fait également
des recommandations générales aux Etats parties
sur les questions concernant l’élimination des
discriminations à l’égard des femmes.
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